Le Canada doit tirer des leçons de cette Coupe du monde en demi-teintes

DOHA, Qatar — Le Canada quitte la Coupe du monde «la tête haute», selon le sélectionneur John Herdman. Mais il quitte aussi le Mondial sans victoire, au dernier rang du groupe F et en ayant été la deuxième équipe éliminée du tournoi.

C’est donc une performance en demi-teintes qu’a offerte le Canada à sa première participation en 36 ans à la classique.

Vrai, le tirage n’a pas été tendre envers le 41e pays au monde, qui s’est retrouvé groupé avec la Belgique (no 2), la Croatie (no 12) et le Maroc (no 22).

La formation d’Herdman a impressionné face à la Belgique, secouant les Diables rouges avec une pression agressive et une attaque rythmée. Mais la performance du Canada a perdu de son lustre en raison de l’effondrement de la formation belge dans ses deux matchs suivants.

Alphonso Davies a ensuite donné espoir au Canada en marquant le premier but de son histoire après 68 secondes de jeu contre la Croatie. Mais les vétérans croates — comme Luka Modric (Real Madrid), Mateo Kovacic (Chelsea) et Marcelo Brozovic (Inter Milan), qui comptaient 27 matchs d’expérience en Coupe du monde — ne se sont pas laissé démonter: ils ont mis en pièce le milieu de terrain du Canada, en route vers une victoire sans appel de 4-1, mettant fin aux aspirations canadiennes.

Puis, contre un Maroc motivé, les vedettes canadiennes ont vu ce que ça donne que de commettre des erreurs face à une opposition de qualité: vous êtes punis.

Le Canada tirait de l’arrière 2-0 après 23 minutes. Il s’est incliné 2-1.

«Je pense que dans nos trois rencontres, nous avons des aspects à célébrer. (…) Nous sommes une jeune équipe en développement, a déclaré un Herdman positif après le match contre le Maroc. Ça a été toute une expérience.»

Herdman a utilisé 19 joueurs dans le tournoi, dont 15 comme partants. Six ont amorcé les trois rencontres, tandis que sept, dont Samuel Piette et les deux gardiens substituts, n’ont pas du tout été utilisés.

«Maintenant, nos joueurs ont été vus, comme notre personnel d’entraîneurs, a ajouté Herdman. Nous savons que des gens autour du monde regardent ce que nous faisons en se disant à quel point nous avons de bons jeunes joueurs.»

Comme on pouvait s’y attendre, le Canada a trouvé la marche entre la Concacaf et le reste du monde plutôt haute. À quel point il a réussi son ascension au sommet du monde est matière à débat.

«Nous avons toujours dit que le niveau mondial est la prochaine étape, a rappelé Herdman, dont la fiche à la tête de la formation masculine est maintenant de 32-13-5. Je ne crois pas que nous soyons très loin (du niveau de compétition).»

Le Canada a marqué 54 buts en 20 matchs de qualification. Seul le Japon, avec 58, a mieux fait. Mais il n’a marqué que deux buts au Qatar, dont un contre-son-camp marocain.

Selon la FIFA, le Canada a lancé 35 tirs vers les filets adverses, mais seulement six ont trouvé le cadre. Ses adversaires ont cadré 15 de leurs 29 tirs.

L’âge moyen de la formation canadienne était de 26,9 ans dans ce tournoi, soit la moyenne des équipes impliquées. Mais 13 des 26 joueurs dont Herdman disposait étaient âgés de 25 ans ou moins.

Herdman a aussi connu un tournoi en demi-teintes. Reconnu pour son éloquence et ses talents de motivateur, il a paru nerveux. Ses commentaires avant le match contre la Croatie lui ont explosé au visage. Les Croates, sans surprise, ont été piqués au vif.

On est aussi en droit de se demander pendant combien de temps encore l’équipe masculine doit s’appuyer sur la mentalité «fraternelle» d’Herdman. Les équipes d’élite sont des machines bien huilées plus qu’une bande de frères d’arme. Elles s’attendent à gagner parce qu’elles ont le talent, la force mentale et la profondeur nécessaire pour demeurer au sommet. Et parce qu’elles l’ont fait auparavant.

Les joueurs canadiens sont toutefois très loyaux envers leur entraîneur, qui visiblement, fait quelque chose de bien.

Si l’avenir de l’équipe masculine semble brillant, la fédération a du travail à faire avant d’organiser le prochain Mondial de concert avec les États-Unis et le Mexique.

Avec 60 à 65 employés à temps plein (la fédération américaine en compte 249), les capacités de Soccer Canada ont été grandement testées en route vers cette Coupe du monde. Et elle doit maintenant s’entendre avec ses joueurs sur un contrat de travail t la façpon de diviser les 9 millions $ US reçus en bourses.

Comme lors des compétitions précédentes, la collaboration avec les médias a été difficile. Il a fallu une mini-révolution des journalistes sur place pour finalement avoir accès à Davies.

Les compagnies qui connaissent du succès ne cachent pas leurs principaux atouts. Elles les rendent disponibles.

Soccer Canada a aussi connu toutes sortes d’ennuis à respecter les horaires pendant ce tournoi. L’équipe avait 41 minutes de retard pour son premier point de presse en 36 ans. Herdman en semblait à la fois gêné et fâché.

Avant le match contre la Croatie, un dirigeant irrité de la FIFA a crié aux joueurs canadiens de prendre place pour la traditionnelle photo d’avant-match afin que la rencontre soit lancée à temps. Le monde entier — littéralement — attendait après le Canada.

Il y a donc des leçons à apprendre à la fois sur le terrain comme à l’extérieur en vue de 2026.