Une consultation pour repenser la forêt

FORESTERIE.  Le gouvernement du Québec a annoncé que le ministère des Ressources naturelles et des Forêts effectuera une vaste consultation nationale et régionale afin de repenser l’aménagement de la forêt. Quels sont les enjeux importants pour le Haut-Saint-Maurice, la Mauricie et le Québec? L’écho a discuté avec le chef de service foresterie et de l’aménagement du territoire pour Ville de La Tuque, Patrice Bergeron.

C’est en 2013 la dernière fois que Québec a mis de l’avant une consultation publique pour l’aménagement de la forêt.

« On est très heureux que la ministre Maïté Blanchette-Vézina fasse cette consultation-là. Quand il doit y avoir des changements sur la forêt, c’est une obligation du gouvernement de consulter la population. La Ville de La Tuque va assurément participer à cette consultation pour exprimer nos points de vue. On est à se préparer pour ça », indique l’ingénieur forestier Patrice Bergeron.

« On le sait, dans la région du Haut-Saint-Maurice, l’industrie forestière est très présente et très importante pour l’économie de la ville. On sait qu’on est très dépendants de la récolte et de la transformation de la ressource forestière du territoire. C’est environ 95% de nos emplois manufacturiers à La Tuque qui sont issus de l’industrie forestière. Donc, quand l’industrie forestière est malade, c’est un peu toute la population, toute la communauté qui en souffre. On était mûr au Québec pour repenser une réforme du régime comme ça fait déjà 10 ans », ajoute M. Bergeron.

La première préoccupation pour la Ville est le changement des conditions climatiques. « Les changements climatiques peuvent engendrer des périodes de sécheresse qui sont inhabituelles et ça peut engendrer d’importants feux de forêt comme nous avons connu l’an dernier. Ça représente des pertes de possibilités forestières de 620 000 m3 de bois. Pour le Haut-Saint-Maurice, ça représentait 9500 m3. Il faut aussi penser aux foyers de la tordeuse de bourgeons sur le territoire qui s’attaquent au bois. Ça se traduit par des grandes destructions et par le fait même, la baisse de la possibilité forestière », poursuit M. Bergeron.

Dans le monde forestier, tous les ingénieurs sont d’accord pour dire que le monde forestier a besoin de plus de prévisibilité. « Je suis vraiment d’avis qu’il faut revoir nos façons de faire dans nos méthodes d’aménagement forestier. Surtout pour prévenir et s’adapter à ces nouvelles réalités-là d’aujourd’hui. Il y a différentes méthodes d’aménagement forestier qui peuvent être prises en compte. Par des plantations d’essence qui sont mieux adaptées au climat, moins vulnérables aux grandes épidémies ou aux feux de forêt, diminuer les impacts des insectes, éviter des grands massifs de plantations homogènes. Un des problèmes du régime forestier actuellement, c’est qu’on est incapable d’avoir de la prévisibilité dans nos opérations forestières. On ne sait pas où les forestiers vont aller dans 2 ou 3 ans. Ça cause des insécurités. L’été forestier, il n’y a rien de pire que ça de ne pas savoir où tu vas aller l’année prochaine. Tu n’es pas en mesure de construire des chemins d’avance, de laisser le temps au chemin de durcir. Ça a un coût au niveau de nos entreprises, mais ça a aussi un coût environnemental, parce que ça nous amène à dépenser plus d’essence, à transporter plus de gravier, à déplacer de machinerie. Ça fait baisser la compétitivité de nos entreprises. Il n’y a pas de raison ici qu’on ne soit pas capable d’assurer une prévisibilité dans les opérations forestières », exprime-t-il.

Sans aucun doute, les régions veulent que la gestion de la forêt soit décentralisée afin qu’elle soit réalisée par chacune des régions forestières qui sont toutes différentes. La Fédération québécoise des municipalités (FQM) a d’ailleurs réalisé des représentations afin que les MRC et les villes soient au cœur de cette gestion.

« Ce n’est pas vrai que de l’aménagement forestier, c’est la même chose d’une région à l’autre. C’est très différent. Ça fait des années et des années que le monde forestier demande ça, mais ce n’est jamais fait. On a des forces ici et on aimerait qu’elles soient beaucoup plus participatives à cette gestion forestière là », commente l’ingénieur forestier.