Grève des CPE: un cri du cœur pour contrer la pénurie et valoriser les emplois
MAURICIE. Plus de 13 000 travailleuses des centres de la petite enfance (CPE) affiliées à la CSN ont entamé aujourd’hui (23 janvier) une journée de grève nationale, un mouvement qui touche l’ensemble des régions du Québec, dont le Cœur du Québec.
Regroupées en grand nombre au stade Quillorama de Trois-Rivières avant de marcher jusqu’au parc Champlain, ces travailleuses dénoncent les conditions difficiles dans lesquelles elles exercent leur métier et interpellent le gouvernement pour qu’il prenne des mesures concrètes afin de freiner la pénurie de personnel et valoriser leurs emplois.
Les revendications des travailleuses, qui ont adopté un mandat de cinq jours de grève à 94 %, portent notamment sur la réduction de leur charge de travail, une augmentation des salaires pour assurer l’attraction et la rétention du personnel, des primes de disparité régionale pour les zones éloignées et des ratios éducatrices-enfants plus équilibrés.
Un cri du cœur
Lors de la prise de parole au parc Champlain, Pascal Bastarache, président du Conseil central du Cœur du Québec-CSN, a souligné l’urgence de la situation.
« Aujourd’hui, les travailleuses des quatre coins du Québec envoient un message clair au gouvernement. Il y a plusieurs semaines, il y a eu un mandat de grève adopté à près de 94 %, partout à travers le Québec pour cinq jours de grève. Il y a eu une négociation qui se déroule, qui a toujours lieu depuis plusieurs mois. Malheureusement, le gouvernement s’entête à faire perdurer la situation. On vit vraiment beaucoup de problématiques qui sont, selon nous, critiques sur le terrain, dues au manque de ressources d’il y a plusieurs années. Donc, aujourd’hui, on veut envoyer un message clair au gouvernement. C’est que la reconnaissance des travailleurs qui travaillent dans le milieu des CPE, elle est vitale. On doit agir, On a besoin d’un coup de barre. »
De son coté, Suzy Gaillardetz, présidente du SRTT en CPE du Cœur du Québec a mentionné leur frustration face au retard des négociations avec le gouvernement. Ainsi qu’une transparence sur les aspects financiers liés à leur secteur.
« Comme Pascal vient de le dire, nous, on s’attend à ce que le gouvernement se mette à la table. Présentement, il retarde la négociation. Il ne sort pas les chiffres ni le monétaire. On veut des meilleurs conditions pour tous nos travailleurs qui travaillent dans le CPE et on veut enfin qu’on ait notre part du gâteau », ajoute t-elle.
Réjean Leclerc, président de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS-CSN), a également dénoncé l’immobilisme du gouvernement.
« Ce rassemblement aujourd’hui, c’est l’expression brute de la mobilisation de femmes qui en ont assez de se faire niaiser aux tables de négociation puisque leur demande est plus que légitime, elle est essentielle pour le bien-fondé de la société québécoise, parce qu’elles prennent soin de nos enfants et leur salaire est risible, complètement insuffisant. Ces femmes, qui prennent soin de nos enfants chaque jour sont sous-payées et doivent se battre à chaque négociation. Les conditions actuelles sont injustes et risquent de compromettre l’avenir des CPE. Le gouvernement doit faire preuve de sérieux et revenir à la table de négociation avec des offres décentes. »
Des conditions de travail dénoncées
La grève vise aussi à mettre en lumière les disparités salariales entre les travailleuses des CPE et d’autres secteurs. « Les éducatrices, les responsables alimentaires et le personnel administratif sont tous sous-payés, alors même qu’ils jouent un rôle essentiel dans notre société », a ajouté M. Leclerc.
Par ailleurs, Marie-Lou Côté, éducatrice à la petite enfance chez Mini Campus à Drummondville, qui s’est jointe au mouvement de grève des CPE pour réclamer de meilleures conditions de travail a mentionné ce surplus de travail.
Selon elle, les éducatrices doivent jongler avec un manque de soutien pour les enfants ayant des besoins particuliers, ce qui complique leur travail au quotidien. « Nous devons nous débrouiller sans aide, souvent en faisant des heures supplémentaires à la maison pour planifier des activités et offrir une meilleure sécurité à nos copains à la garderie », explique-t-elle.
Le salaire proposé par le gouvernement, une augmentation de 12,5 %, est jugé insuffisant par rapport à la hausse de 17,4 % obtenue par d’autres secteurs publics. De plus, les travailleuses des régions éloignées, comme la Côte-Nord ou les Îles-de-la-Madeleine, ne bénéficient toujours pas de primes de disparité régionale, ce qui complique davantage l’attraction et la rétention de personnel qualifié.
Les revendications des travailleuses ne concernent pas uniquement leurs conditions de travail, mais aussi la qualité des services offerts aux enfants. Elles demandent le respect des ratios éducatrices-enfants et un meilleur soutien pour les enfants ayant des besoins particuliers.
« Ces premières années sont cruciales pour le développement des enfants. Si nous leur donnons les ressources nécessaires maintenant, nous bâtissons une société plus forte et plus équitable », a rappelé Réjean Leclerc.
Une mobilisation qui se poursuit
Alors que cette première journée de grève nationale s’achève, les porte-parole de la CSN espèrent que le gouvernement entendra leur appel. Cependant, ils préviennent qu’ils sont prêts à utiliser les quatre autres journées de grève prévues si la situation reste inchangée. « La balle est dans le camp du gouvernement. Nous voulons négocier, mais s’il ne fait rien, nous continuerons à nous battre pour nos droits et pour l’avenir des CPE », a conclu Suzy Gaillardetz.
Outre un meilleur encadrement, les éducatrices revendiquent une revalorisation salariale. Marie-Lou Côté compare leur situation à celle des enseignants, qui bénéficient de salaires plus compétitifs et d’un soutien accru. « Nous voulons être reconnues en tant qu’éducatrices, pas seulement comme des gardiennes », insiste-t-elle.
La mobilisation de ce jeudi n’est que la première étape d’un mouvement plus large, alors que les travailleuses des 22 CPE de la région du Cœur du Québec, répartis sur 42 installations, restent déterminées à obtenir des conditions de travail qui reflètent l’importance de leur rôle dans la société québécoise. Ils espèrent aller jusqu’au bout pour obtenir gain de cause.
Marie-Lou Côté conclut en lançant un message au gouvernement. « Reconnaissez notre rôle, écoutez-nous et aidez-nous pour le bien des enfants et de leur développement. Nous sommes prêtes à aller jusqu’au bout pour obtenir ce que nous demandons. »