De grands défis pour le nouveau chef d’Opitciwan

POLITIQUE.  Le nouveau chef d’Opitciwan, Jean-Claude Mequish, perçoit le vote exprimé le 13 septembre dernier comme celui d’un grand besoin de changement dans la communauté. Il s’est même immédiatement mis à la tâche.

Père de cinq enfants et grand-père de neuf petits-enfants, Jean-Claude Mequish a une expérience politique de quatre ans, lui qui est passé du poste de vice-chef à celui de chef.

Ironie du sort: son arrière-arrière-grand-père, Paul Mequish, a déjà été chef d’Opitciwan vers la fin des années 1890, tout comme son père, aussi Paul Mequish, par intermittence au cours de cinq mandats entre 1980 et 2008.

«J’ai ça dans le sang», rigole cet ancien contremaître forestier, qui a habité La Tuque dans les années 80, à l’époque où il a effectué un cours d’aménagement de la forêt à l’école secondaire Champagnat.

Les négociations territoriales

Les défis sont très grands pour Opitciwan, dont la population se chiffre aujourd’hui à 3000 âmes, en plus de 500 personnes qui vivent hors communauté.

Le chef Mequish a déjà débuté ses fonctions officielles. Il s’est rendu rencontrer les autorités du Conseil de la nation atikamekw pour discuter des différents dossiers.

Le nouveau chef ne cache pas qu’il travaille actuellement à rebâtir des ponts avec le Conseil de la nation atikamekw (CNA), à propos de dossiers comme les revendications territoriales. Une distance avait été prise alors qu’en janvier dernier, Opitciwan déposait à la Cour supérieure du Québec une requête pour la reconnaissance de leur titre et leurs droits ancestraux sur leur territoire ancestral. On estimait avoir tourné en rond au cours des 40 dernières années de négociations territoriales globales.

Les élus du conseil d’Opitciwan, appuyés par les mandataires des familles traditionnelles votaient alors une résolution ordonnant la révocation immédiate du mandat de négociation du CNA à la table de négociation Atikamekw/Québec/Canada.

«Le conseil l’appuyait (l’ancien chef). Moi j’étais là-dedans. Mais, au cours de l’année, beaucoup de gens m’ont contacté pour me dire que ce n’était pas la meilleure façon de faire, parce qu’ils voulaient demeurer dans les négociations», poursuit Jean-Claude Mequish.

Ce dossier sera donc une priorité pour le nouveau conseil des Atikamekw. «Si on a un traité d’ici 10 ans, on va avoir un gouvernement Atikamekw […] On va avoir nos propres lois», entrevoit-il.

Opitciwan vise aussi une pareille entente pour les services jeunesse, qui ont fait l’objet d’une entente entre Québec et les communautés de Manouane et de Wemotaci.

«Dans le temps du chef Simon Awashish, Opitciwan avait décidé de rapatrier les services sociaux (…) c’était une prise en charge de nos services sociaux», précise le chef Mequish.

Le logement

Le nouveau chef n’a aucun mal à identifier ses autres chevaux de bataille. La question du logement l’interpelle, surtout en raison de la croissance de la population, avec une cinquantaine de naissances par année. «À cause des problèmes de logement, il y a une surpopulation dans les maisons. C’est dû, en principe, au sous-financement du fédéral. On est à peu près 150 logements en retard pour combler les besoins», met-il en évidence.

Même le centre de la petite enfance est rempli à craquer. «C’est plein, il n’y a plus de place. Ça nous prendrait pratiquement une autre garderie». L’été dernier, la communauté était à la recherche active d’enseignants.

La santé, les services sociaux, le logement communautaire, l’éducation, voilà autant de champs de compétence que gèrent les conseils Atikamekw, ce qu’ailleurs, les conseils municipaux n’ont pas à prendre en charge. «Autrement dit, on se prend en main» résume le chef Jean-Claude Mequish.

La lutte aux trafiquants de drogue, amorcée par l’ancienne administration Awashish, va se poursuivre. Mais le nouveau chef ne se met pas la tête dans le sable, les résultats n’ont pas été ceux escomptés. «Ça n’a pas vraiment diminué le nombre de consommateurs. On a beau adopter des règlements, la lutte aux trafiquants de drogue, c’est encore un gros problème. On va devoir se pencher là-dessus », fait-il valoir.

L’économie

Opticiwan sort tout juste d’un plan de redressement (Plan d’aide en gestion), affirme le chef Mequish. La construction, plus stagnante ces dernières années, a repris de la vigueur avec l’arrivée de nouvelles maisons.

La scierie n’est pas le principal employeur du village, mais elle fournit tout de même du travail à 50 personnes, en plus d’un partenariat établi avec des entreprises de l’extérieur.

Par contre, les activités forestières sont surveillées par certaines familles d’Opitciwan, qui ne souhaitent pas de déforestation sur leur territoire. «Il y a quand même des mesures d’harmonisation qui se font, des consultations», concède Jean-Claude Mequish. Évidemment, la chasse et la pêche sont des activités traditionnelles pratiquées depuis toujours par les Atikamekw. L’épicerie du village, une société en commandite, est gérée par le conseil.

À travers cette activité économique, il y a aussi la cueillette des petits fruits, dont les bleuets. «Chaque année, des personnes sans emploi y participent et rapportent un peu d’argent pour leurs familles», laisse entendre le chef, qui effectue lui-même le transport de ces fruits lors des vacances en été.