La distance n’existe plus en orthophonie

SANTÉ. On l’a souvent démontré : la pandémie de la COVID-19 occasionne des bris de service dans plusieurs secteurs d’activités. Mais, qu’on le veuille ou non, elle amène aussi à se réinventer. La pandémie doit-elle mettre un frein aux services de santé ? Le CIUSSS-MCQ pense que non.

Ariane Belisle et son fils, Félix Adams peuvent en témoigner : le web représente une solution viable et fort intéressante.

Le jeune garçon de 6 ans voit depuis quelque temps une orthophoniste pour corriger un problème de bégaiement. Les rencontres se sont faites d’abord à Trois-Rivières puis, plus récemment, à Shawinigan avec l’orthophoniste Joanie Trudel. C’est Mme Belisle qui accompagne son fils à chacune des consultations puisqu’il est préférable que ce soit toujours le même parent qui fasse ensuite les exercices avec l’enfant. Cela engendre donc des déplacements vers Shawinigan chaque deux semaines.

Arrivent la pandémie et l’arrêt des rencontres, en raison des consignes gouvernementales. Il fallait donc se lancer dans un plan B en mettant en place quelque chose de complètement nouveau.

«Nos services en personne ont cessé le 20 mars, un peu après les écoles […] on a commencé à évaluer si on pouvait faire de la téléorthophonie par Zoom. J’ai commencé à voir certains clients au début, milieu avril», indique Mme Trudel.

On a alors commencé à faire des essais. «Avec tous les clients, ça s’est poursuivi, parce que ça allait vraiment très bien. J’ai été agréablement surprise des résultats», témoigne Mme Trudel.

En dépit de limites imposées par le son, ou d’un manque d’attention qui peut parfois survenir, elle affirme que dans les dossiers qu’elle a menés par la télépratique, elle a vu des enfants intéressés à l’écran, qui trouvent plaisante cette façon de faire, d’autant plus qu’ils sont chez eux, sans le stress et la fatigue imposés par les déplacements.

«Avant la pandémie, Félix manquait une demi-journée d’école et moi, une demi-journée de travail, aux deux semaines», note Ariane Belisle.

Félix apprécie beaucoup et chose importante, sa motivation est demeurée la même à chaque séance.  «C’est plus détendu comme façon de faire», a aussitôt noté Mme Belisle.

Le web a même permis d’augmenter la cadence.  «Le fait de le voir toutes les semaines, je peux dire que ça assure un meilleur suivi, plus régulier, plus étroit», confirme l’orthophoniste, qui ajoute deux ingrédients essentiels : des parents impliqués et un garçon qui offre un bon niveau d’attention.

Pendant les quelques semaines où le service n’a pas pu être offert, en attendant la téléorthophonie, le bégaiement de Félix s’était un peu accentué, mais le tout est rentré dans l’ordre à la reprise du traitement.

«Mon rôle est d’outiller les parents, qui appliquent une approche à la maison. Chaque semaine, quand se voit, on vient adapter le niveau d’activités à faire», détaille Mme Trudel. L’orthophoniste en convient : la télépratique offre d’intéressants avantages, mais ça ne convient pas nécessairement à tous. Néanmoins, les deux tiers de ses clients ont opté d’emblée pour cette nouvelle manière de recevoir des services.

Le CIUSSS affirme qu’à La Tuque, des orthophonistes assurent des suivis au niveau langagier, mais pas pour les bégaiements.

Poursuivre après la pandémie ?

Une fois la COVID-19 passée, il se pourrait bien qu’on conserve ces nouvelles façons de faire dans nos habitudes. Après tout, subsistera toujours l’économie de temps.

«Je ne dis pas qu’il n’y aura plus de rencontre en personne, car il y a quand même un plus à ça, mais, à mon avis, une grande partie du suivi pourrait se poursuivre via Zoom», envisage Joanie Trudel.

Une opinion que partage Ariane Belisle : «Si je ne dois descendre qu’une fois par mois, c’est déjà ça de moins à l’horaire pour nous».

Des avancées bénéfiques pour un grand territoire

Pour le CIUSSS-MCQ, ces avancées technologiques permettent de mieux rejoindre la population, puisque le territoire à couvrir est très grand.

La zone nord (La Tuque, Shawinigan, Maskinongé, Vallée-de-la-Bastiscan) compte 13 orthophonistes, soit l’équivalent à temps complet de huit ressources.

«Avec la pandémie actuelle, ce sont les deux tiers des enfants qui étaient vus par des orthophonistes qui ont entamé des procédures de téléconsultations, donc, plus de 100 enfants dans la zone nord», évalue Kellie Forand, agente d’information au CIUSSS-MCQ. Elle souligne que les intervenants ont fait preuve d’adaptation afin de trouver des manières de mieux servir la population en cette période de crise sanitaire.