La décarbonation au cœur de l’avenir du Groupe Rémabec

FORESTERIE.  Le Groupe Rémabec a fait l’acquisition en 2014 d’une usine de sciage à Port-Cartier sur la Côte-Nord. Depuis la pandémie, cette usine a complètement été transformée grâce à des investissements de 125 M$ afin qu’elle produise et qu’elle fonctionne au biocarburant. Parallèlement, une autre usine a été construite avec Carbonity qui produit du biochar. Éric Bouchard, coprésident du groupe Rémabec, nomme ce complexe comme étant « un laboratoire forestier ». C’est ce modèle qui pourrait être calqué à l’usine de Rivière-aux-Rats.

Avec plusieurs produits conçus à l’usine de Port-Cartier, le coprésident et chef des affaires stratégique du développement et de l’administration au Groupe Rémabec Éric Bouchard attend l’auteur de ces lignes dans la salle de conférence du siège social de l’entreprise basée à La Tuque. 

« Ç’a été difficile au départ avec l’usine de Port-Cartier avec toutes sortes de problèmes à l’intérieur de l’usine. On a été en mesure de remettre l’usine sur pied et cette usine fait maintenant du biocarburant à partir de la biomasse forestière, explique M. Bouchard. Elle a une capacité annuelle de 40 millions de litres. Ce produit est principalement destiné à décarboner les grands émetteurs de GES. On évite des GES avec ce transfert qui est à très faible émission. On évite environ 70 000 tonnes de GES par année avec le biocarburant. Ce n’est pas négligeable. De plus, c’est un produit qui est bien vu et qui va bien au niveau industriel. Une fois l’usine démarrée, la production de biocarburant produit un gaz et il est réutilisé en circuit fermé. »

Le biocarburant peut servir aux raffineries pour produire du diésel par exemple, mais il y a aussi le marché de l’alimentation, et du carburant vert pour les avions. « 40 millions de litres c’est un petit volume, mais c’est notre laboratoire forestier où on teste différentes technologies et différentes recettes pour voir où on est capable d’emmener le produit. On a plusieurs étapes à franchir, mais il y a plusieurs possibilités », ajoute M. Bouchard.

Les sous-produits du bois vont directement à la production de biocarburant. On peut penser au bran de scie, les copeaux ou de la planure. « On ne peut pas envoyer de l’écorce par contre. Alors on a développé une autre usine, Carbonity, qui fait du biochar. C’est un produit qu’on peut intégrer à l’intérieur de la production de l’écorce. Il est question de produire 10 000 tonnes de biochar par année, ce qui est une des plus grosses productions répertoriées. C’est seulement pour la phase 1 puisque l’usine a été construite pour produire 30 000 tonnes de biochar annuellement. »

Pour l’instant, une première phase a nécessité un investissement de 42 M$, et pour la phase 2, l’entreprise prévoit un investissement de 40 M$ pour les deux autres lignes de production de biochar.

« En ayant deux lignes de biocarburant, trois lignes de biochar, en plus de la scierie, on est capable d’intégrer l’ensemble des produits de sciage qui sortent de la scierie. On sera capable de rentrer une bille ronde et de ressortir que des produits à valeur ajoutée. C’est une économie circulaire à même le site », ajoute M. Bouchard.

Le biochar est utilisé en agriculture pour augmenter la qualité des sols, et donc leur productivité. Il est également utilisé pour la dépollution de sols ou sédiments et dans la lutte contre le réchauffement climatique comme solution de séquestration à long terme de carbone atmosphérique dans les sols.

Aussi, lorsque les bovins mangent une petite quantité de biochar avec leur moulée, il existe une diminution des émanations de méthane produite par les bovins. « C’est un marché de niche, et on regarde un protocole de recherche avec des partenaires en Europe. »

Le coprésident ajoute que l’entreprise détient une longueur d’avance dans ce domaine avec le déploiement du laboratoire forestier de Port-Cartier depuis deux ans. « Personnellement, je ne connais pas de complexe intégré de A à Z dans les produits verts comme nous en Amérique du Nord. On devait trouver de nouveaux débouchés pour utiliser notre fibre avec des produits en début de signe de vie. On croit beaucoup à la décarbonation. On sait qu’on peut être un joueur important dans ce domaine. Certains produits sont éligibles au crédit carbone. Lorsqu’on sera certain que notre technologie sera robuste et qu’on aura une continuité dans le marché, on pourra prendre une décision d’investissements ailleurs. Toute la connaissance qu’on a chaque jour nous permet d’envisager de faire d’autres projets. »