De bien Jeunes Outardes

COMMUNAUTÉ. Depuis trois ans, un groupe d’aînés, les Jeunes Outardes, se donne rendez-vous au Parc des chutes-de-la-petite-rivière-Bostonnais. Ce groupe de gens jase ensemble, rigole, mais surtout, socialise.

Pas question pour ces Outardes d’associer la retraite à se restreindre à écouter la télé, sur sa chaise berçante.

Chaque jour, sur leurs triporteurs et leurs quadriporteurs, ces gens longent la piste cyclable pour atteindre le parc des Chutes, où ils passent une heure, deux heures, ensemble.

« On a commencé une «gang» d’amis qui se sont acheté des quadriporteurs (…) On en a tous et on s’amuse comme des petits fous », décrit Pierre « Pierrot » Ferron. Du haut de ses 84 ans, M. Ferron est le doyen du groupe, mais il incarne aussi cette jeunesse toujours présente, qu’on ressent facilement en parlant avec ces gens qui ne veulent surtout pas s’encabaner.

Diane Lavoie a même mis sur pied une page Facebook où sont affichés les rendez-vous, les photos de ces jeunes outardes.

Pourquoi les outardes ?

Deux pistes d’explication possibles. Dans un premier temps, les outardes, on le sait, sont de grandes voyageuses, comme le groupe. Mais aussi, au Parc des chutes, on en voit souvent.

« Près du pont, il y a tout le temps une outarde avec ses bébés », a remarqué M. Ferron. Ces volatiles sont devenus en quelque sorte l’emblème du groupe.

Certains membres du groupe se connaissaient depuis quelque temps, d’autres pas. Il y en a qui ont fait connaissance grâce au groupe la Lucarne. Des amitiés tissées serrées se sont vite formées, qui vont bien au-delà des rencontres au parc des Chutes.

« Ce sont de bons amis, quand il arrive de quoi, on est inquiet pour eux autres », insiste Mme Lavoie.

Les Jeunes Outardes créent une belle habitude chez la trentaine d’habitués de ces randonnées. « On se fait des soupers vers la fin de la saison », ajoute Mme Lavoie. Le groupe ne se voit pas aussi régulièrement durant l’hiver, mais tient à se réunir au moins une fois.

Ce qu’on veut briser, c’est le mythe selon lequel on ne se promène en quadriporteur que si on est une personne à mobilité réduite. « Il y en a plusieurs qui étaient gênés de s’acheter ça parce qu’ils disaient: je ne veux pas avoir l’air d’un vieux, d’un handicapé ou ce que tu veux. Regarde, on marche tous », lance pour sa part Dorothy Bélanger.

Mme Bélanger, qui a vécu un deuil l’an dernier, a trouvé dans son quadriporteur et les rendez-vous des Jeunes Outardes un réconfort salutaire : « Si je n’avais pas acheté ça, si je n’avais pas fait ça avec la gang, je pense que je n’aurais pas passé à travers […] Encore, en m’en venant tantôt, je disais : »mausus« de machine, que je l’aime ».

La piste cyclable est bien entretenue, tient à signaler le groupe, qui apprécie aussi y croiser quelques animaux à l’occasion.

Les utilisateurs sont nombreux

Depuis les deux ans qu’il est à l’emploi de l’Atelier Roule Vélo, Yves Simard constate que les triporteurs et les quadriporteurs sont en effet très en vogue.

Des gens à partir de 55 ans s’en procurent. Pas nécessairement des gens à mobilité réduite. Certains conduisent toujours leur auto, leur motoneige, vont à leur chalet, mais plutôt que d’utiliser leur vélo qu’ils n’ont pas pris depuis longtemps, s’en remettent tout simplement à un triporteur ou un quadriporteur. Cela leur permet de passer du temps à l’extérieur et de voir des gens.

Un phénomène qui ressemble à ce qu’on observait y a quelques années, quand les vélos électriques sont apparus et qu’ils ont aidé des gens, devenus un peu, moins en forme, à continuer d’apprécier leur loisir favori.

« Quand est arrivée la pandémie, ç’a enlevé plein d’activités, mais les activités de plein air étaient là, les gens se sont remis à faire du vélo. Il y en a qui ont connu le vélo électrique », relate M. Simard. Un phénomène qui se ressemble au niveau des triporteurs et des quadriporteurs, même si c’est à une échelle un peu moins grande.

Cette soif de se rassembler, au terme d’une pandémie particulièrement restrictive au point de vue des contacts sociaux, aura certainement nourri cette découverte d’un moyen de transport permettant à plusieurs Jeunes Outardes de rejoindre leurs amis dans le cadre enchanteur du parc des Chutes.

« On s’en retourne quand on n’a plus de mots », s’amuse Pierre Ferron.