Quand l’industrie forestière rencontre la culture

La forêt contribue depuis longtemps à façonner l’identité de la Mauricie, notamment sur les plans économique et artistique. Au tour du Théâtre PÀP à vouloir s’y attarder avec une nouvelle vision dans le cadre du projet Radio-ressources.  

Depuis quelques semaines déjà, le Théâtre PÀP et son équipe parcourent les différentes régions du Québec afin d’en découvrir les enjeux socioéconomiques, ce qui s’écrit, l’histoire, les perspectives d’avenir, ce qui a marqué leurs paysages, etc. Dans le cadre du projet Radio-ressources, les ressources forestières, minières et agricoles se mélangent au matériel artistique, poétique ou littéraire des artistes qui vivent et pratiquent en région.

Le projet prend la forme de tables rondes virtuelles diffusées en direct sur le Web. La table ronde consacrée à la Mauricie se déroulera le 5 mai en soirée.

L’épisode portant sur la Mauricie mettra notamment de l’avant Chantal Moulin Vézina, biologiste forestière chez ZEC Mauricie, la mycologue Emmanuelle Caya, un ingénieur forestier, ainsi que Patrice Bergeron, président de Bioénergie La Tuque.

Quand on aborde sa participation à un projet culturel, il rigole quand on lui demande s’il va jouer au théâtre, le temps d’une prestation. Par contre, il accordera une entrevue à l’animateur Patrice Dubois pour parler d’un sujet qui le passionne depuis de nombreuses années: la forêt.

Vulgarisateur né, l’ingénieur forestier est la personne toute désignée pour parler des enjeux forestiers du Haut-Saint-Maurice. L’industrie forestière, tout ce qui touche les approvisionnements, mais aussi la question de la bioraffinerie forestière, voilà autant d’éléments qui seront abordés.

Le projet BELT a attiré l’attention des organisateurs. «Le fait qu’on puisse valoriser une ressource qui n’est pas actuellement utilisée sur le territoire et qui est abandonnée là. On veut maximiser l’utilisation de cette ressource et en faire un produit vert qui pourrait éventuellement nous aider à réduire nos impacts environnementaux», résume Patrice Bergeron.

«L’objectif était aussi de réunir des invités qui porteraient des regards différents sur la forêt. On a la chance qu’il y a toute une mythologie sur la forêt dans la région. C’est intéressant pour moi de fouiller le point de vue historique de l’industrie forestière, mais je veux aussi voir comment la forêt a un impact sur la vie des gens aujourd’hui, explique Patrice Dubois, directeur artistique de la compagnie de recherche théâtrale PÀP qui est derrière le projet Radio-ressources. Ce qui m’intéresse, c’est également d’aborder la forêt comme territoire de cohabitation par l’industrie, les cueilleurs et les gens qui l’habitent.»

Avec Radio-ressources, il s’amuse à marier des éléments qui ne se rencontreraient pas normalement. On peut penser à la poésie qui rencontrera des démarches industrielles en foresterie, par exemple. Les entrevues avec les invités seront d’ailleurs entrecoupées par les comédiens du groupe L’Ensemble qui liront des textes d’auteurs de la Mauricie qui se sont inspirés de la forêt et du territoire.

«Ce projet me change complètement. Depuis plusieurs mois, on rencontre des gens fascinants qui ont des démarches, des causes et des métiers tout aussi fascinants. Ça change aussi ma volonté d’occuper le territoire comme artiste. Je pense qu’on a un devoir de parler de notre société, mais également avec notre société. Dans son ADN, ce projet a cette volonté de parler avec la société. On ne veut pas reproduire l’idée de l’artiste de Montréal qui parle des régions. On veut se plonger dans le bain, qu’il y ait un dialogue», détaille le directeur artistique.

En Côte-Nord, au Bas-Saint-Laurent et au Lac-Saint-Jean, Patrice Dubois remarque que c’est particulièrement le monde ancien ou la tradition et le nouveau qui se rencontrent au fil des discussions. «Par exemple, sur la Côte-Nord, l’industrie forestière est en déclin, mais les citoyens ont racheté le port de Baie-Comeau pour repenser son utilisation, raconte-t-il. Je réalise aussi qu’en général dans les régions, l’histoire est plus belle et complexe que celle qu’on a l’habitude de se raconter.»

«Chaque territoire a ses particularités. Au départ, j’avais comme intuition que l’histoire qu’on se raconte est possiblement plus complexe ou moins binaire. Sur la Côte-Nord, j’ai découvert que ce sont les femmes qui ont gardé le tissu social bien vivant. En Mauricie, je trouvais seulement des hommes reliés à l’industrie forestière. Puis, je suis tombé sur Chantal Vézina qui est une jeune femme biologiste qui travaille avec 11 conseils d’administration de ZEC qui sont menés de façon traditionnelle. Elle amène un tout nouveau regard et de nouvelles perspectives pour gérer les ZECS», ajoute-t-il.

Le projet Radio-ressources est la première étape d’un projet théâtral dont l’écriture se fera sur les territoires visités et qui se jouera dans ces mêmes territoires.

Les billets pour assister à l’événement virtuel du 5 mai à 19h sont disponibles gratuitement à sur le site Web du Théâtre PÀP.

(En collaboration avec Michel Scarpino)