« On privilégie un dialogue entre les Atikamekw et Québec »

L’industrie forestière se retrouve entre l’arbre et l’écorce, image, sans jeu de mots, Marc-André Despins, directeur général de la Coopérative forestière du Haut-Saint-Maurice. Il résume la position des forestiers face à la sortie du Conseil de la nation atikamekw et des Atikamekw de Manawan, qui estime que l’industrie « prend le beurre et l’argent du beurre ».

L’entrée en vigueur du régime forestier, en 2013, a fait en sorte que ce n’est plus l’industrie forestière qui planifie les différentes consultations avec les Atikamekw. « C’est le ministère qui a pris ce rôle-là. Ce n’est pas nous qui choisissons les prescriptions sylvicoles, on ne décide pas de la planification des secteurs qui vont être récoltés », nuance-t-il.

Dans le cadre des mesures d’harmonisation, ce sont les forestiers qui ont le devoir d’exécuter les travaux. « Nous sommes l’entrepreneur qui exécute les contrats pour le ministère de la Forêt, de la Faune et des Parcs (MFFP). C’est le ministère qui s’occupe de la planification de la récolte », ajoute M. Despins.

Advenant l’imposition d’un moratoire, les forestiers subiraient les contrecoups des négociations, si elles ne se déroulent pas bien, entre les Atikamekw et Québec.

Il rappelle que 60 000 emplois découlent directement de l’industrie de la forêt, un nombre qui va doubler si on tient compte des emplois indirects : « Une fermeture aurait des impacts importants, pas seulement pour la Coopérative, mais pour toute l’industrie forestière de la Maurice. Ce qu’on privilégie, c’est le dialogue. Par contre, n’étant pas partie prenante de la solution, on envisage un dialogue entre le ministère et les Atikamekw ».

Il croit que le régime forestier doit être réactualisé ou faire l’objet d’une refonte majeure, puisqu’il semblait plus facile, avant son adoption, d’harmoniser les opérations quand c’était l’industrie forestière qui voyait à la planification.

M. Despins rappelle que l’industrie forestière donne accès à la forêt aux villégiateurs, aux cueilleurs, aux gens qui possèdent des chalets de même qu’à ceux qui fréquentent les Zecs et les pourvoiries en ouvrant des chemins.

« En période de pandémie, les habitudes des Québécois ont changé, il y a beaucoup plus de permis de pêche et de chasse qui se sont vendus. C’est grâce à l’industrie forestière qui donne accès à la forêt ».

La Régime d’aménagement durable des forêts est un des plus rigoureux mondialement, fait également valoir le directeur général de la Coopérative forestière, qui évoque au passage que l’industrie forestière s’est positionnée comme un acteur majeur face aux changements climatiques.

Il explique que la forêt a un cycle et les arbres qui ne sont pas récoltés peuvent tomber au vent, être dévorés par les insectes et être ravagés dans un incendie forestier. Un arbre qui tombe risque de causer davantage d’effet de serre qu’un arbre récolté, qui est ensuite utilisé, par exemple, pour la construction.

« C’est prouvé scientifiquement que les arbres d’entre 10 et 30 ans d’âge vont capter beaucoup plus de carbone que les arbres matures, au-delà de 30 ans jusqu’en fin de vie », détaille aussi M. Despins, faisant allusion aux opérations de reboisement de l’industrie forestière.

On refuse de se positionner davantage, car au-delà de la question forestière, il subsiste des enjeux politiques relatifs aux revendications territoriales des Atikamekw.

Comptant une quarantaine de membres, la Coopérative forestière donne du travail à 150 personnes en Haute-Mauricie.