L’industrie touristique interpelle Québec : «On est rendu en mode survie»

La ministre du Tourisme, Caroline Proulx, annonçait la semaine dernière la première phase du calendrier de déconfinement concernant l’industrie touristique québécoise. De son côté, l’industrie attend avec impatience les deux prochaines étapes évoquées par la ministre, soit le calendrier pour la deuxième phase de déconfinement et le plan de soutien financier à l’industrie.

«On a besoin d’un coup de main financier du gouvernement. On a besoin de soutien aux frais fixes et d’un prolongement à la subvention salariale», rappelle Donald J Desrochers, président de Tourisme Mauricie et président-directeur général de la chaîne hôtelière Hôtels Marineau. «Qu’il y ait beaucoup ou peu de clients, on doit garder les lumières allumées, payer nos taxes et continuer de couvrir nos autres frais fixes. Ça fait des moins que l’on pellette nos factures par avant. Notre demande est sensée, étudiée et ça se fait ailleurs. On veut juste de l’aide.»

«On est bien prêt à participer activement à la relance de l’économie dès cet été, mais pour assurer les emplois et s’adapter pour recevoir les clients en respectant la distanciation sociale, ça va prendre des sous. Lors de la crise économique de 2008, l’industrie touristique a pris quatre ans à se relever. L’industrie ne pourra pas encore emprunter pendant quatre ans. On a besoin d’aide, et on ne veut pas des chèques en blanc. On veut le partage des risques.»

La ministre Proulx a également mentionné que les Québécois pouvaient dès maintenant commencer à planifier et prendre leurs vacances au Québec.

C’est dans cet esprit que Tourisme Mauricie interpelle aujourd’hui le ministre responsable de la région de Mauricie, Jean Boulet, la ministre des Affaires municipales, Andrée Laforest, et la ministre déléguée au Développement économique régional, Marie-Ève Proulx, afin de les inciter à encourager le premier ministre François Legault à venir en aide à l’industrie touristique.

On veut un calendrier précis de déconfinement et des mesures efficaces pour supporter l’industrie touristique dans ses coûts fixes.

«Ça va être compliqué», entrevoit d’entrée de jeu Nicolas Bernard, propriétaire de la Seigneurie du Triton, quand il parle du fait qu’on ne connaisse pas tous les détails entourant le déconfinement qui s’effectuera certainement au cours des prochaines semaines. Que ce soit pour les pourvoiries, les auberges, les restaurants ou les campings, le calendrier officiel du déconfinement n’est pas encore connu. Bien difficile pour les gestionnaires de ces établissements d’évaluer comment les choses vont se dérouler au cours des prochaines semaines, alors que normalement, la saison touristique bat son plein.

«Peu importe si on ouvre dans une semaine, dans deux semaines, on s’attend à des pertes de plus de 120 000 emplois, de plus de 4G$ dans l’ensemble, malgré le petit déconfinement au compte-goutte. On parle de plus de 30 000 entreprises touristiques et qui génèrent 15G$ d’activité économique, ce sont 400 000 emplois. C’est énorme, le tourisme, au Québec».

-Nicolas Bernard

«On est rendu en mode survie au niveau du tourisme», laisse-t-il tomber.

L’ensemble de l’industrie touristique connaîtrait, normalement, le début de sa saison estivale. Les pourvoiries, c’est la pêche. «En mai et juin , on a perdu 80% de la clientèle au niveau de la pêche, pour l’ensemble des pourvoyeurs. Des revenus qui ne sont pas au rendez-vous parce qu’on a dû être fermés. Le ministre du Tourisme travaille très fort pour faire avancer le dossier, notre député Marie-Louise Tardif aussi. Mais on sait que les différents postes sont menées par la Santé publique et c’était une très bonne chose dans le gros de la crise. L’effort collectif à faire pour se sauver physiquement il était très important, mais on est rendu à la santé économique des entreprises qui sont en péril. On est dans une phase critique», pense M. Bernard

L’industrie touristique et de la restauration ont été les premières à être écartées du secteur économique en début de crise.

Les touristes internationaux ne seront pas au rendez-vous cette année, mais les québécois commencent à sonner à la porte des pourvoiries. Mais plusieurs clients vont choisir de rester près de chez eux, comme en font foi les ventes de piscines qui explosent cette année. M. Bernard croit que c’est le temps pour les gens de la région de profiter des différentes pourvoiries qui leur offrent une belle expérience.

Une expérience différente mais tout aussi intéressante

Déjà, un plan sanitaire strict avait été mis en place par les différentes pourvoiries. Dans le cas de la Seigneurie du Triton par exemple, la formule a été repensée. «On va être capable d’ouvrir le 4 juin. Ça va être exclusivement des unités d’hébergement, donc une chambre ou un chalet pour une famille de la même adresse. Mais les gens ne pourront pas profiter de l’intérieur du bâtiment, de la salle à manger ou des aires communes».

Le tourisme, on n’en entend pas parler. Ce n’est pas un secteur d’activité qui est au crochet du gouvernement, qui vit de subventions. Le monde s’organise, ce sont des entrepreneurs qui travaillent fort. Mais là, on est rendu en mode survie.

-Nicolas Bernard

Les clients pourront profiter de deux chambres, une où ils pourront dormir et l’autre et qui leur servira de salle à manger, où on leur livrera leur repas. «C’est une autre expérience, c’est quelque chose de différent et on a travaillé fort pour mettre cela en place. Cette peut-être pour une semaine, deux semaines, on ne sait pas. On n’a pas de calendrier», ajoute le pourvoyeur. Habituellement, 35 personnes y trouvent du travail au plus fort de la saison estivale, mais en raison des conditions actuelles, on a fait appel à une quinzaine de personnes.

Avec la collaboration de Jonathan Cossette