« J’ai eu une belle carrière de princesse! »

PORTRAIT.  Le Latuquois Philippe Gouin a pris sa retraite du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) après 30 ans de carrière. Le jeune retraité de 53 ans a partagé des histoires de sa carrière à l’Écho et il se dit privilégié d’avoir pu exercer son métier pendant 30 ans à Montréal sans trop de répercussions psychologiques.

À l’instar de plusieurs jeunes Latuquois, Philippe Gouin a quitté La Tuque à 18 ans pour ses études. Après avoir obtenu son diplôme d’études collégiales au Cégep de Trois-Rivières en Techniques policières, Philippe revient à La Tuque pour faire partie de la brigade des policiers-pompiers-ambulanciers de l’époque du service de sécurité publique de La Tuque.

« J’a commencé à l’été 1991 et j’ai juste fait un été. Mon père avait la pharmacie Gouin et Trahan et il se faisait achaler par ceux que j’arrêtais. Je ne voulais pas faire vivre ça à mes parents, alors je suis parti pour Longueuil dans le but de rentrer dans la police de Montréal. »

Après avoir travaillé pendant six mois pour le service de polices de Longueuil, Philippe Gouin a été accepté par le SPVM en novembre 1992.

Pendant les 5 premières années, le policier a été affecté dans Westmount sur la patrouille. « C’était habituellement tranquille dans Westmount, mais ma première intervention a été sur un double meurtre. Je n’avais pas 10 minutes de fait pour le SPVM! »

Ensuite, pendant 5 ans il patrouillait en duo au centre-ville de Montréal, et les 5 années suivantes il se trouvait toujours au centre-ville, mais en solo. « Un an au centre-ville de Montréal peut égaler à cinq ans dans un autre corps de police. C’était complètement fou. En étant en solo, je n’avais plus à faire d’intervention, on est plus responsable du rapport à la fin d’une intervention. J’ai adoré ça en solo, je n’avais plus à me pogner avec du monde et je n’avais plus d’arrestation à faire. »

Parmi ses anecdotes, il raconte comment c’était fou lorsque les Bruins de Boston venaient jouer à Montréal. « Les hôtels étaient pleins de Bostonnais qui foutaient le bordel. Souvent ils étaient jetés dehors de l’hôtel et c’est nous qui devions leur dire de sortir. Ça brassait! Mais pour vrai, j’ai été chanceux dans ma carrière, je n’ai pas pogné de choses vraiment dégueulasses. Tant mieux! J’ai eu une belle carrière de princesse! »

En 2007, le Latuquois est devenu policier en moto pour le reste de sa carrière, soit 15 ans. « Comme motard, tu n’as pas à aller sur des interventions. C’était une belle fierté pour moi parce que le cours de motard a le plus haut taux d’échec parmi tous les cours au SPVM, et je l’ai réussi du premier coup. Un policier sur cinq échoue le test. Contrairement sur une patrouille dans un quartier, tu peux aller partout en moto. En plus, c’est nous qui sommes responsables de faire les escortes pour les grands événements ou des célébrités. J’ai escorté René Angélil et Céline Dion plusieurs fois, les Rolling Stones, Justin Trudeau, et plusieurs autres. Moi je suis une belette, j’aime ça être partout alors ça m’allait bien. J’ai eu une carrière privilégiée! »

Le volet humain

Philippe Gouin indique qu’il faut du sang froid et être ouvert d’esprit pour être policier à Montréal. « J’ai souvent fait de la prévention avec les nouveaux arrivants. J’ai été policier sociocommunautaire dans des écoles défavorisées. Je suis fier d’avoir agi avec chaque citoyen comme si c’était un membre de ma famille. J’étais très humain dans mes interventions. Dans mes dernières journées, un policier est venu me voir pour me dire que c’était grâce à moi s’il était devenu policier. Je l’avais embarqué dans la voiture de police pour qu’il voie c’est quoi la patrouille pour une soirée. J’avais les yeux pleins d’eau. »

À 53 ans, c’est plutôt jeune pour une retraite. Ce sont des maux physiques qui ont eu raison de l’homme de loi. « J’ai fait une période dans le métro de Montréal, et on marche beaucoup. J’ai vu la misère humaine. Mes hanches me faisaient très mal, et j’ai toujours eu des maux de dos à cause du ceinturon. Il y a tellement d’équipement là-dessus. J’aurai pu rester dans un bureau, mais je n’aurai pas été capable. Je ne suis pas un gars de bureau. La pression sociale aussi a eu son effet. C’est toujours la faute de la police et avec les réseaux sociaux c’est encore pire. »

Le Latuquois et la musique

Chansonnier à ses heures, Philippe Gouin a fait les manchettes en 2007 avec sa chanson sur les accommodements raisonnables « Ça commence à faire là! » sur l’air de Mosquito de Joe Dassin. Sa chanson a eu des millions de visionnements sur YouTube dans 5 pays francophones. Il avait alors reçu une sanction écrite pour avoir terni l’image du SPVM, mais si elle n’avait pas été faite dans le cadre de son travail d’agent.

Récemment, le Latuquois a repris sa guitare pour écrire sa chanson de retraite sur un air de Vincent Vallières. Elle a été vue plus de 25 000 fois sur son compte Facebook et plus de 30 000 fois sur TikTok.