Les Atikamekws se sentent trahis par Ottawa

TERRITOIRES. Le gouvernement fédéral vient de porter en appel des décisions du Tribunal des revendications particulières qui donnait gain de cause aux Atikamekws, dans le dossier de l’inondation des territoires lors de la mise en eau du réservoir Gouin en 1918.

La communauté Atikamekw d’Opitciwan se sent trahie par le gouvernement fédéral, avec lequel elle avait pourtant noué de très bonnes relations depuis l’élection générale du 19 octobre 2015.

Le chef d’Opitciwan, Christian Awashish, est visiblement déçu de la décision du gouvernement fédéral.

Dans l’appel déposé, le gouvernement conteste les décisions de trois des quatre requêtes présentées au procès qui avait débuté en 2013.

« Nous sommes extrêmement déçus par la décision du gouvernement fédéral d’en appeler de certains de ces jugements. Pourtant, depuis son élection, le gouvernement de Justin Trudeau avait réussi à convaincre toutes les Premières Nations du pays du fait qu’il entendait faire de la politique autrement et qu’enfin, les autochtones retrouveraient leur juste place au sein des préoccupations gouvernementales. La déception est d’autant plus grande que nous avions cru aux belles paroles de justice sociale du premier ministre et que nous avions même été jusqu’à appuyer publiquement la candidature du député libéral de la Mauricie. De plus, comme la ministre de la Justice est elle-même issue d’une Première Nation, nous nous serions attendus à ce qu’elle soit sensible à notre réalité. Pour notre peuple, la trahison est d’autant plus grande.», déplore le Chef Christian Awashish.

Il interprète que les avocats du gouvernement fédéral ont réussi à influencer la décision d’aller en appel par peur que la décision rendue fasse jurisprudence dans d’autres causes semblables à travers le pays.

En 1918

Lors de l’aménagement du barrage Gouin, les inondations avaient causé la destruction des habitations ainsi que l’engloutissement des terrains et de tous les biens qui s’y trouvaient.

«Bien que le gouvernement ne fasse pas appel sur l’ensemble des revendications, dont celle de l’inondation du territoire, cet événement a eu plusieurs conséquences graves pour la communauté. En plus de constituer un épisode traumatisant pour la population, les gestes posés ont entraîné la disparition définitive des traces de la mémoire collective de cette dernière, en plus de provoquer la perte du territoire ancestral qui assurait leur subsistance», affirme le conseil d’Opitciwan.

On pense que le gouvernement du Canada ne reconnaît pas les manquements du passé «alors que le Tribunal des revendications particulières, quant à lui, est sans équivoque et donne raison à Opitciwan, déclarant notamment « que la Couronne fédérale a manqué à son obligation légale et fiduciaire durant le processus de création de la réserve et après la création de celle-ci », ajoutant que « ces manquements ont occasionné des pertes (…) devant être compensées ».

Ces jugements rendus par le juge du Tribunal des revendications particulières, une institution créée pour trancher sur les litiges entre Ottawa et les Premières Nations, sont sans équivoque ; le gouvernement du Canada n’a pas veillé à l’intérêt fondamental des Autochtones dans ce dossier.

« En plus, pour ajouter l’insulte à l’injure, le gouvernement du Canada a déposé sa demande d’appel la veille de la Journée nationale des Autochtones. Quel message le gouvernement veut-il maintenant envoyer ? Remet-il en question la légitimité du tribunal qu’il a lui-même créé ? Une chose est certaine, cet appel du gouvernement aura de lourdes conséquences sur nos relations bilatérales et aura un impact considérable sur les négociations territoriales globales et les autres dossiers en cours », a poursuivi le Chef Awashish.

La déception est grande envers le gouvernement libéral. « D’autant plus que la communauté a voté pour ce parti».

Il n’y a pas eu de communication entre Opticiwan et le gouvernement fédéral. «Le seul geste posé a été d’aller en appel», indiquait le chef de la communauté qui n’a pas eu non plus l’occasion de parler au député François-Philippe Champagne.